16 – 18 rue Suger
Paris 6° (RER Saint-Michel)
En partenariat avec le CRPMS
Mardi 21 janvier 2020 de 11h à 13h
# MeToo : critique et clinique ?
Annie Benveniste, Marie-Dominique Garnier, Monique Selim
Face à l’assignation sexuée, les écarts entre les générations paraissent jour après jour s’agrandir, faisant prendre la mesure des changements idéologiques qui sont intervenus dans les cinquante dernières années. Des nœuds catégoriels se donnent à voir aux deux niveaux des modes de (re)production et des logiques de contestation des assignations. Le mouvement numérique #MeToo a connu une ampleur extraordinaire qui a semblé bouleverser radicalement ces assignations et qui, tous les jours, résonne un peu plus aux quatre coins du monde. Il est reconstruit comme une date d’inauguration d’une nouvelle ère, de nouvelles normes auxquelles gouvernements, institutions, acteurs collectifs et individuels seraient astreints à se plier. En quoi la mobilisation ,qui se poursuit à travers lois, décrets et procès a-t-elle changé les conceptualisations de la dualité sexuelle ? Sommes nous face à des dynamiques de libération et/ou de resubstantialisation des identifications de sexe ? Qu’en est-il, dans ce contexte des féminismes pluriels qui ne cessent de diverger sous le coup d’accusations multiples ? Qu’est-il énoncé et proposé au nom des femmes ? Ces questions et bien d’autres nourriront les débats de cette séance.
Annie Benveniste est anthropologue, enseignante-chercheur émérite à l’université Paris 8, membre du Laboratoire d’études de genre et de sexualité (UMR LEGS).
Marie-Dominique Garnier est angliciste et littéraire de formation, chercheure à l’UMR-LEGS et Professeure de littérature de langue anglaise et d’études de genre à l’Université Paris 8, à l’UFR Textes et Sociétés.
Monique Selim est anthropologue, directrice de recherche émérite à l’Institut de recherche pour le développement (IRD), chercheure associée au Centre d’études en sciences sociales sur les mondes africains, américains et asiatiques (CESSMA, Université Paris Diderot,IRD,INALCO).
Argumentaire du séminaire
Ce séminaire propose de repenser les dialogues et les mises à l’épreuve réciproques entre anthropologie et psychanalyse. Il s’efforce d’articuler trois lignes de questionnement :
• Clinique du terrain et terrains cliniques : des anthropologues s’interrogent sur la nature des relations interpersonnelles développées durant leurs enquêtes, le sens et les modalités de leur écoute, et, corollairement, les mobiles intimes de la parole des acteurs. Les crises économiques et politiques qui bouleversent de nombreuses sociétés s’impriment, en effet, dans la situation ethnologique. De surcroît, l’ethnologue se trouve de plus en plus fréquemment en contact avec des populations en fragilisation croissante, en état de non inscription, et même d’errance.
• Folie et État : on développera une réflexion croisée, d’un côté sur les effets sur les élaborations identitaires des nouvelles représentations du bien-être psychique, de l’autre, sur les instances de légitimation sur ce que serait une bonne santé psychique en termes de prévention, de diagnostic, de traitement et de leur évaluation. Enfin, le lien doit être souligné entre les terreurs issues de la violence de l’État et les confusions des registres du Réel, de l’Imaginaire et du Symbolique, qui font tenir l’existence singulière et les échanges sociaux. D’une certaine manière, la folie a disparu au profit de l’exclusion et de la stigmatisation des perdants. Dans les pays lointains qui ne rentrent pas dans cette industrialisation du soin, l’OMS., au contraire, préconise un retour aux dispositifs dits « traditionnels », légitimant médiums, devins et autres guérisseurs. Dans ces deux configurations du monde globalisé, les États jouent un rôle majeur, idéologique, symbolique, mais aussi institutionnalisant les corps des professionnels du soin psychique. La psychanalyse fait actuellement l’objet d’un débat social, d’autant plus aigu que c’est la singularité du sujet individuel qui est en jeu. La présence de la psychanalyse dans les institutions de soin et d’enseignement redevient l’enjeu d’une lutte, alors que la psychiatrie et la psychopathologie sont de plus en plus biologiques.
• Un dernier volet : rouvrir le débat entre anthropologie et psychanalyse de l’ordre épistémique et épistémologique, à l’heure où le cognitivisme est, pour un nombre croissant d’anthropologues, un outil de validation de leurs recherches et de leurs résultats. La généralisation de l’économie de marché a eu des effets de plus en plus prononcés sur les définitions de la souffrance psychique, des troubles mentaux, leurs modes de diagnostic et leur traitement. Dans les démocraties industrielles, on constate la dominance des modélisations biologiques et neurologiques, le retour à un primat héréditaire et la mise en avant de polices de rééducation comportementaliste.
Séminaire mensuel organisé par :
Olivier Douville, psychanalyste, Laboratoire CRPMS Université Paris 7, douvilleolivier@noos.fr
Nicole Khouri , sociologue, IMAF khouri.n@wanadoo.fr
Julie Peghini, anthropoloque, Maître de conférences en sciences de l’information et de la communication à l’Université Paris 8, Laboratoire CEMTI, julie.peghini@univ-paris8.fr
Monique Selim, anthropologue, directrice de recherche émérite à l’IRD CESSMA monique.selim@ird.fr