16 – 18 rue Suger
Paris 6° (RER Saint-Michel)
En partenariat avec le CRPMS
Mardi 28 avril 2020 de 11h à 13h
Corps en colère. Les femmes dans les révoltes arabes
Annie Benveniste, Valérie Pouzol
« Corps en colère » situe la réflexion au niveau des sujets en rébellion, partant de la façon dont les corps parlent, s’insurgent, pour réfléchir à la dynamique des mouvements sociaux ; de la façon dont ces derniers ont pris des formes mobiles ou fragmentées qu’il s’agisse de soulèvements radicaux ou de révoltes plus limitées mais constantes, bien que peu visibilisées. Cet angle de vue conduit à des analyses sur les innovations en terme de luttes, sur les nouveaux acteurs et actrices de ces luttes mais aussi sur les nouveaux outils à inventer pour en rendre compte. Les formes de contestation de l’ordre social sont multiples et ne se réduisent pas au répertoire des mouvements sociaux décrits par les politologues. Elles incluent des modalités qui relèvent de la performance artistique à portée hautement politique, quand les corps sont soumis à des épreuves qui incarnent la résistance.
Le numéro soulève également la question de la reconstruction mémorielle des événements entraînant la sélection des figures emblématiques : comment la mémoire hiérarchise, non seulement les actes mais leurs auteurs, valorisant souvent le sacrifice des hommes, rétablissant, à travers une stricte répartition des rôles, un ordre social que les rébellions avaient cherché à contester.
Sommaire
Introduction : Valérie Pouzol (MCF, Paris 8) et Annie Benveniste (MCF, HDR, Paris 8).
Zakia Salime : « Les corps dans les révolutions arabes : hiérarchies et micro-rébellions ».
Abir Kréfa et Rania Majdoub : « Le corps des femmes dans la Tunisie postrévolutionnaire : propriété individuelle ou corps otage ? »
Annie Benveniste : « Femmes en mouvement, femmes en politiques ».
Perrine Lachenal : « Lignes de faille Le Caire, 2011 : ordres, violences et passages à l’acte ».
Kinda Chaib : « Donner du corps aux martyrs. Les femmes dans les enterrements de martyrs au Liban Sud (2011-2015) ».
Hana Jaber : « Corps en colère, corps fragmenté : ébauche d’une lecture biopolitique du conflit syrien ».
Annie Benveniste est anthropologue, enseignante-chercheure émérite à l’université Paris 8, membre du Laboratoire d’études de genre et de sexualité (UMR LEGS).
Valérie Pouzol est hitorienne, enseignante-chercheure à l’université Paris 8, membre du Laboratoire d’études de genre et de sexualité (UMR LEGS).
Argumentaire du séminaire
Ce séminaire propose de repenser les dialogues et les mises à l’épreuve réciproques entre anthropologie et psychanalyse. Il s’efforce d’articuler trois lignes de questionnement :
• Clinique du terrain et terrains cliniques : des anthropologues s’interrogent sur la nature des relations interpersonnelles développées durant leurs enquêtes, le sens et les modalités de leur écoute, et, corollairement, les mobiles intimes de la parole des acteurs. Les crises économiques et politiques qui bouleversent de nombreuses sociétés s’impriment, en effet, dans la situation ethnologique. De surcroît, l’ethnologue se trouve de plus en plus fréquemment en contact avec des populations en fragilisation croissante, en état de non inscription, et même d’errance.
• Folie et État : on développera une réflexion croisée, d’un côté sur les effets sur les élaborations identitaires des nouvelles représentations du bien-être psychique, de l’autre, sur les instances de légitimation sur ce que serait une bonne santé psychique en termes de prévention, de diagnostic, de traitement et de leur évaluation. Enfin, le lien doit être souligné entre les terreurs issues de la violence de l’État et les confusions des registres du Réel, de l’Imaginaire et du Symbolique, qui font tenir l’existence singulière et les échanges sociaux. D’une certaine manière, la folie a disparu au profit de l’exclusion et de la stigmatisation des perdants.
Dans les pays lointains qui ne rentrent pas dans cette industrialisation du soin, l’OMS., au contraire, préconise un retour aux dispositifs dits « traditionnels », légitimant médiums, devins et autres guérisseurs. Dans ces deux configurations du monde globalisé, les États jouent un rôle majeur, idéologique, symbolique, mais aussi institutionnalisant les corps des professionnels du soin psychique. La psychanalyse fait actuellement l’objet d’un débat social, d’autant plus aigu que c’est la singularité du sujet individuel qui est en jeu. La présence de la psychanalyse dans les institutions de soin et d’enseignement redevient l’enjeu d’une lutte, alors que la psychiatrie et la psychopathologie sont de plus en plus biologiques.
• Un dernier volet : rouvrir le débat entre anthropologie et psychanalyse de l’ordre épistémique et épistémologique, à l’heure où le cognitivisme est, pour un nombre croissant d’anthropologues, un outil de validation de leurs recherches et de leurs résultats. La généralisation de l’économie de marché a eu des effets de plus en plus prononcés sur les définitions de la souffrance psychique, des troubles mentaux, leurs modes de diagnostic et leur traitement. Dans les démocraties industrielles, on constate la dominance des modélisations biologiques et neurologiques, le retour à un primat héréditaire et la mise en avant de polices de rééducation comportementaliste.
Séminaire mensuel organisé par :
Olivier Douville, psychanalyste, Laboratoire CRPMS Université Paris 7, douvilleolivier@noos.fr
Nicole Khouri , sociologue, IMAF khouri.n@wanadoo.fr
Julie Peghini, anthropoloque, Maître de conférences en sciences de l’information et de la communication à l’Université Paris 8, Laboratoire CEMTI, julie.peghini@univ-paris8.fr
Monique Selim, anthropologue, directrice de recherche émérite à l’IRD CESSMA monique.selim@ird.fr