Journée d’étude "Mondes caraïbes et cransatlantiques en mouvement"
Université Paris Diderot-Paris 7/CESSMA
UMR Passages/Paris 8/FMSH/ITM
De l’anthropocène au plantationocène : racialisation et politiques de la nature
Journée 1, 20 mars 2018
Cette journée est consacrée à une tentative de penser les rapports de pouvoir opérant à l’échelle des interactions entre l’humain et le « Système-Terre » dans ce que les scientifiques désignent la « zone critique ». A l’heure où le nouveau grand récit de l’anthropocène présente le risque de réduire l’humanité en une entité homogène en tant que force géologique, il nous paraît nécessaire de réintroduire urgemment la question du politique et de l’asymétrie qu’il génère. La multiplication des qualificatifs pour désigner cette nouvelle période géologique tels que « Capitalocène » ou encore « Plantationocène » mettent ainsi l’accent sur le temps long et le rôle du régime des plantations des Amériques comme étape clé de la transition vers une nouvelle ère géologique. Ces nouvelles perspectives nous incitent à examiner plus que jamais les imbrications de rapports sociaux de domination dans les politiques de la nature.
En écho à ces travaux, nous postulons que la plantation et ses prolongements est un laboratoire pour penser la rupture qui s’est opérée, caractérisée par des circulations intenses de plantes, d’animaux et d’êtres humains transformés en ressources. C’est en effet dans la plantation que s’articule avec le plus d’intensité la violente domination des corps noirs et indigènes, des végétaux et des animaux.
Au travers des interventions et des débats, nous chercherons à montrer comment les enjeux de l’anthropocène ne relèvent pas seulement des processus d’interaction entre humains et non-humains mais reposent aussi sur la production d’un ordre hiérarchisé et racialisé.
9h30 Accueil et ouverture de la journée par les membres du groupe MCTM
Linda Boukhris, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, EIREST ; Christine Chivallon, CNRS, UMR PASSAGES ; Didier Nativel, Université Paris Diderot, CESSMA
Les termes du débat : environnement et rapports sociaux de race, de classe et de genre
10h Linda Boukhris, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, EIREST
Introduction de la journée : « Anthropocène et plantationocène : de quoi parle-t-on ? »
10h30 Pierre Charbonnier, CNRS, Lier-IMM-EHESS
« L’anthropocène et la nouvelle crise de l’universel. Quand le monde se retourne contre la modernité »
11h15 p a u s e - café
Prolongement dans les contextes caribéens (post)coloniaux
11h30 Andreas Malm, Lund University
« Follow the river : on white domination of nature and maroon resistance ecology in the colonial caribbean »
12h30 p a u s e – déjeuner
14h15 Jean-Baptiste Fressoz, CNRS, Centre Alexandre Koyré, EHESS, « L’autre découverte de Christophe Colomb : le changement climatique »
14h45 Malcom Ferdinand, Royal Netherlands Institute of Southeast Asian and Caribbean Studies, « Résister au Plantationocène : le cas des plantations de bananes dans la Caraïbe française (Martinique et Guadeloupe) »
15h30 p a u s e - café
16h Jean-François Boclé, artiste-plasticien
« Poetica bananera »
16h30 Discussion conduite par les membres du groupe MCTM
18h Clôture : bilan provisoire et introduction de la journée 2 du 29 mai.
Journée 2, 29 mai 2018
Cette seconde journée de notre cycle fait suite à celle consacrée aux rapports entre processus de racialisation et politiques de la nature (« De l’anthropocène au plantationocène »). Son objectif est d’interroger les variations du paradigme de la race au cours des dernières décennies marquées par l’apogée du paradigme constructiviste.
Ce dernier avait semblé résoudre les présupposés de la différenciation raciale reposant sur l’approche biologique qui culmine au XIXe siècle avec le racisme scientifique. Au début des années 2000, cette perspective constructiviste a été remise en cause par les avancées des savoirs de la génétique et de la biotechnologie qui posent la question d’une nouvelle naturalisation des différences. Dans un même mouvement, divers courants dont ceux associés aux débats sur l’« humain/non-humain » ont semé le doute quant à la possibilité de théoriser le social comme le résultat de purs produits de la pensée. Le concept de « race » se trouve de ce fait soumis à des variations sémantiques profondes allant de la posture alertant du risque d’une nouvelle réification de la race aux approches favorables à une intégration des multiples dimensions du biologique pour servir à décrypter le social.
Au cours de cette rencontre, nous voulons interroger ces différents positionnements constructivistes et post-constructivistes relatifs à la race. Le passage de la race biologique à la race comme construit social, est-il véritablement entériné ? La race pensée à travers les nouveaux savoirs génétiques conduit-elle à concevoir un nouveau paradigme de la race ?
Programme en cours