L’Harmattan, Odile GOERG, 2020
C’est souvent grâce au cinéma ambulant que les Africains ont,
pour la première fois, été confrontés à des images animées.
Aux premières projections en plein air improvisées au début
du 20e siècle succèdent des tournées périodiques, organisées
par des circuits commerciaux de distribution. Les autorités s’en
mêlent rapidement : autorisations, contrôles administratifs,
censure marquent les débuts du cinéma en Afrique. Les
spectateurs — jeunes et vieux, hommes et femmes, musulmans
ou chrétiens — se familiarisent avec le 7e
art. Déjà ancrée dans
l’entre-deux-guerres, cette pratique se développe après 1945 où le
cinéma est un loisir plébiscité non seulement en ville mais aussi à
la campagne.
Jean-Paul Sivadier, actif en Afrique de l’Ouest entre 1956 à
1959, a laissé des documents exceptionnels témoignant de ce
phénomène : un récit circonstancié de ses tournées au Sénégal,
en Haute-Volta (Burkina Faso), au Soudan français (Mali) et en
Mauritanie, et des dizaines de photographies prises sur le vif.
Le lecteur installe ainsi avec lui la « salle de cinéma », assiste de
l’intérieur à la projection, vibre avec les spectateurs devant les
fi lms d’action et d’aventure. Il découvre aussi, au jour le jour, la vie
aventureuse et parfois précaire d’un projectionniste ambulant.
Son récit foisonnant, annoté par l’historienne Odile Goerg, ainsi
qu’une sélection de photographies permettent d’appréhender la
place de ce nouveau loisir dans l’Afrique des années 1950 en se
plaçant au plus près des publics. Ils permettent aussi d’entrevoir
la réalité humaine et économique d’une petite entreprise de
cinéma à la fi n de la période coloniale.
Odile Goerg est professeure émérite en histoire de l’Afrique (Université
de Paris, Paris-Diderot) et membre du CESSMA (Centre d’Étude en
Sciences Sociales sur les Mondes Africains, Américains et Asiatiques),
UMR 245. Ses recherches portent sur l’histoire sociale et culturelle en
contexte urbain, en particulier sur les loisirs et le cinéma. Elle a publié
divers articles sur ce phénomène (censure, sociabilité, visibilité des
publics africains…) et un ouvrage, Fantômas sous les tropiques.
Aller au cinéma en Afrique coloniale (Vendémiaire, 2015).
En savoir plus : https://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=65666